L’analyse de cycle de vie (ACV) vise à quantifier les impacts environnementaux d’un produit, service ou d’une activité, sur l’ensemble de son cycle de vie, de façon multicritère.
Tous les impacts calculés se rapportent à une « unité fonctionnelle ».
Unité fonctionnelle, de quoi s’agit-il ?
Selon la norme ISO 14044, l’Unité Fonctionnelle désigne la “Performance quantifiée d’un système de produits, destinée à être utilisée comme unité de référence dans une ACV”.
Pour bien comprendre, considérons deux produits substituables. L’ACV permet de comparer leurs impacts environnementaux. Encore faut-il que les calculs s’appuient sur une base équitable. C’est ici qu’entre en jeu la fameuse unité fonctionnelle !
En effet, si les deux produits sont substituables, c’est qu’ils remplissent la même fonction.
La base de comparaison sera donc un même service rendu, défini par une quantité : c’est l’unité fonctionnelle. Elle doit donc être quantitative. Elle s’exprime souvent sous la forme d’un verbe à l’infinitif.
Cela pourrait être par exemple :
· Contenir un litre d’eau (pour une bouteille)
· Transporter une tonne sur un kilomètre (pour un train)
· Assurer la fonction de table de jardin pendant 10 ans…
Clé de voûte de la comparaison des impacts environnementaux, l’unité fonctionnelle doit être définie avec le plus grand soin.
Il est recommandé de se poser les questions suivantes :
· Quoi ?
· Combien ?
· Pendant combien de temps ?
· Avec quel niveau de performance ?
· Où ?
Le quoi et le combien se passent d’explication.
La notion de temps est essentielle : par exemple, dans le secteur des matériaux du bâtiment, les ACV sont souvent calculées pour une durée d’usage de 50 ans. Cependant, si deux solutions alternatives n’ont pas la même durée de vie attendue, par exemple 25 ans pour la solution A et 50 pour la solution B, alors il faudra compter deux fois plus de produit A que de produit B pour assurer la même fonction. On appelle « flux de référence » la quantité de produit nécessaire pour assurer le service rendu défini par l’unité fonctionnelle. Dans ce cas, une erreur dans la définition de ce flux de référence fausserait les résultats de 50%.
La question du niveau de performance peut être délicate. Les praticiens de l’ACV se réfèrent autant que possible aux normes de qualité – si elles existent pour la catégorie de produits considérée - pour assurer une comparaison équitable. Ainsi par exemple, dans une étude ACV sur un produit coiffant, l’unité fonctionnelle prend en compte l’élasticité d’une boucle de cheveux, mesurée selon la norme ad hoc. S’il faut une triple dose du gel TientBon pour assurer la même tenue qu’une dose du gel FixIt, alors là encore, le flux de référence devra être adapté, afin de garantir une comparaison juste et équitable.
La notion de lieu peut aussi être importante dans certains cas : si l’on évalue l’usage d’une voiture électrique alimentée par le réseau en France continentale ou en Corse, les résultats seront très différents. En effet, le mix français moyen est faiblement carboné, ce qui n’est pas le cas du mix en Corse, où l’électricité est produite à partir de fioul.
Appliquons ces questions à l’exemple de deux peintures pour mur intérieur.
La construction de l’unité fonctionnelle pourrait ressembler à cela :
Quoi ? | Recouvrir un mur intérieur (surface : plâtre) |
Combien ? | 1 m2 |
Pendant combien de temps ? | Pour une durée de 10 ans |
Avec quel niveau de performance ? | Avec un pouvoir couvrant de Classe 1 (opacité mesurée selon la norme ISO 6504-3 supérieure à 99,5%) |
Où ? | En climat tempéré |
L’unité fonctionnelle pourrait donc se formuler ainsi « recouvrir un mètre carré de mur intérieur recouvert de plâtre avec un niveau d’opacité de Classe 1 pour une durée de 10 ans en climat tempéré. »
NB : La notion de climat serait évidemment plus déterminante pour un mur extérieur qu’intérieur.
Revenons au « Flux de référence », défini par la norme ISO 14044 comme la « mesure des sortants des processus, dans un système de produits donné, nécessaires pour remplir la fonction telle qu'elle est exprimée par l'unité fonctionnelle ». Ici, pour atteindre une opacité de classe 1, il sera peut être nécessaire d’appliquer deux couches de la peinture A, et seulement une couche de la peinture B.
Nous voyons ainsi comment ces 5 questions fournissent un guide précieux pour définir l’unité fonctionnelle, et comment les résultats peuvent être sensibles à une variation dans cette définition.
Nous approfondirons ces questions dans un nouveau post la semaine prochaine.